Karen Knorr

Le fumeur d'opium, Chitrasala, Bundi

2014

Karen Knorr est née à Francfort-sur-le-Main, en Allemagne, a grandi à San Juan (Porto Rico) et a fait ses études à Paris et à Londres. Elle vit en Angleterre depuis les années 1970 et a créé un grand nombre d'œuvres qui développent un dialogue critique et ludique avec la photographie. Ses thèmes vont de l'étude des valeurs patriarcales des classes supérieures anglaises au rôle des animaux et à leur représentation dans l'art. Utilisant la photographie pour explorer les traditions culturelles, des gentlemen's clubs de Saint James aux intérieurs luxuriants des palais indiens, le travail de Knorr s'étend à l'art conceptuel, à la culture visuelle et au féminisme. Depuis les années 1980, le travail de Knorr est de plus en plus axé sur l'examen des questions de pouvoir qui sous-tendent le patrimoine culturel. C'est le thème principal de son travail, mais il se cache subtilement sous la richesse visuelle et l'inventivité de ses images. Les photographies de Knorr satisfont à de nombreuses exigences de la photographie traditionnelle qui s'intéresse à l'apparence superficielle d'une espèce ou d'un lieu, mais elles évoluent ensuite vers un espace paradoxal où elles commencent à remettre en question les hypothèses manifestes du contenu de l'image. Dans "India Song", son travail le plus récent, les photographies de Knorr mettent en jeu deux constantes formelles - d'abord l'insertion par des moyens numériques du ou des sujets animaux dans la photographie intérieure toujours frontale et ensuite la pose ou l'action exprimée. Chaque photographie achevée est à la fois un mystère et une fable - faisant référence à la fois à la vaste tradition de la représentation d'animaux dans l'art et à l'appréciation/appropriation par l'Occident de la culture et des formes orientales. À l'instar des premiers photographes pionniers qui ont trouvé en Inde une mine de sujets exotiques, Knorr célèbre la richesse visuelle des mythes et des histoires du nord de l'Inde en utilisant des sites sacrés et séculaires pour mettre en évidence les castes, la féminité et sa relation avec le monde animal. Elle examine l'espace des hommes (mardana) et l'espace des femmes (zanana) dans l'architecture moghole et rajput, qu'il s'agisse de palais, de manoirs ou de mausolées. Ces intérieurs sont minutieusement photographiés à l'aide d'un appareil photo analogique grand format. Les photographies d'animaux vivants réalisées par Knorr sont ensuite insérées dans les différentes pièces et sites, fusionnant la photographie numérique haute résolution et la photographie analogique. Il en résulte des images originales et étonnantes qui réinventent le Panchatantra (un ancien recueil indien de fables animalières) pour le XXIe siècle et brouillent encore davantage les frontières entre la réalité et l'illusion. Bien qu'elle ait beaucoup exposé en Europe et en Inde, "India Song" sera la première exposition personnelle de Karen Knorr aux États-Unis. En octobre dernier, l'œuvre a été nominée pour le Prix de la photographie Deutsche Börse 2012 - la récompense la plus prestigieuse d'Europe "pour un photographe vivant qui a apporté la contribution la plus significative au médium de la photographie au cours de l'année écoulée".