Hendrik Kerstens

Lapin rouge II

2018

Depuis 1995, le photographe néerlandais Hendrik Kerstens photographie sa fille Paula. Ses photographies sont collectionnées par des musées du monde entier et ont inspiré des créateurs de goût aussi différents qu'Elton John et Alexander McQueen. (McQueen a d'ailleurs basé sa collection automne 2009 sur l'image de Paula avec un sac en plastique en guise de coiffe, en utilisant l'image comme invitation pour le défilé). Au départ, les photographies d'Artistics sont nées du désir de l'artiste de capturer quelque chose des moments fugaces qui s'effacent de l'enfance. Les photos témoignent d'événements quotidiens - le coup de soleil de sa fille, le bain de l'enfant. Cependant, un jour, il y eut un moment de révélation lorsque Kerstens la vit non seulement en relation avec les événements de sa propre vie, mais projeta également sur elle son intérêt pour les peintres hollandais du dix-septième siècle. Kerstens se souvient : "Un jour, Paula est revenue d'une promenade à cheval. Elle a enlevé son bonnet et j'ai été frappé par l'image de ses cheveux retenus par une résille. Elle m'a rappelé les portraits des maîtres hollandais et je l'ai représentée de la même manière. Ensuite, j'ai commencé à faire davantage de portraits dans lesquels je me réfère aux peintures de cette époque. Ce qui me fascine particulièrement, c'est la façon dont une peinture du XVIIe siècle est considérée comme une surface qui peut être lue comme une description de la vie quotidienne, par opposition aux peintures de la renaissance italienne, qui racontent généralement une histoire. La peinture d'Europe du Nord repose beaucoup plus sur l'artisanat et le rendu parfait du sujet. L'utilisation de la lumière est déterminante à cet égard".u2028 Plusieurs portraits de Paula rappellent clairement Johannes Vermeer. L'austérité de la photographie, sa clarté, l'expression sereine du visage de la jeune fille, sans oublier la lumière "hollandaise" caractéristique, tout concourt à créer cette impression. Cependant, Kerstens ne se contente pas d'imiter la peinture. Au fur et à mesure que la série progresse, il s'intéresse de plus en plus au jeu consistant à créer un dialogue conceptuel et humoristique entre le passé et le présent. Les titres donnent le ton. "Napkin" ressemble au bonnet d'une femme de chambre. Dans "Bag", un sac d'épicerie en plastique est façonné pour ressembler à une capuche en dentelle. Dans les autres photos, on ne cherche pas à imiter les vêtements du XVIIe siècle, mais le visage de Paula et la lumière de Kerstens transforment un sweat à capuche tout à fait moderne en un vêtement classique et intemporel. Sur le plan conceptuel, les photographies de Kerstens jouent avec le dialogue entre les médiums de la peinture et de la photographie, avec la sérialité et le temps. Sur un plan plus émotionnel, ils abordent la réalité quotidienne tout en exprimant son amour pour son enfant, ainsi que la connaissance et le développement de son métier.