Six assiettes de cabinet réticulées et peintes de scènes de Watteau par Carl Thieme, de Dresde

La porcelaine de Dresde, en tant que terme, fait l'objet d'une certaine confusion. Dans certains contextes, il fait référence aux céramiques à pâte dure produites par les ateliers qui se sont développés dans et autour de la capitale saxonne au XIXe siècle. Dans d'autres, il ne désigne que la production de l'une d'entre elles, la Sächsische Porzellanmanufaktur Dresden, connue en anglais sous le nom de Dresden Porcelain, qui a été créée en 1872 dans la ville de Freital, en Saxe. Pour compliquer encore les choses, les premières publications sur la porcelaine utilisaient souvent indifféremment "Dresde" et "Meissen". Il est vrai que les villes de Dresde et de Meissen sont liées par leur longue histoire commune de production d'arts décoratifs et, en fait, la plupart des porcelaines de Meissen étaient vendues à Dresde, le centre artistique et culturel de la Saxe. Toutefois, c'est à Meissen que se trouve l'usine qui a produit la première porcelaine européenne, au début du XVIIIe siècle, tandis que Dresde n'est devenue célèbre qu'au milieu du XIXe siècle, à l'apogée du renouveau rococo. Et si Meissen est connue pour la fabrication de la porcelaine, depuis les modèles en argile jusqu'au produit fini, Dresde est célèbre pour ses ateliers de décoration, dont il existait plusieurs dizaines dans la ville et ses environs au XIXe siècle. Leurs habiles peintres utilisaient souvent des "ébauches" de Meissen comme toiles. Ainsi, une pièce de porcelaine de Dresde peut avoir été façonnée et cuite à Meissen, peinte à Dresde, et finalement vendue dans l'un des magasins de cette ville.

Les figurines, les assiettes et les vases produits au XIXe siècle grâce à ce procédé complexe restent attrayants aujourd'hui encore, avec leurs teintes vives et leur imagerie pastorale typiques du renouveau rococo, qui a remis au goût du jour les motifs de volutes, de coquillages, de feuillages, de fleurs et de fruits après des décennies de néoclassicisme sobre et de néogothique austère. Les figurines de Dresde, qui, comme leurs homologues de Meissen, s'inspirent des personnages de la Commedia dell'Arte, ont une qualité spirituelle et joyeuse qui a été comparée à celle des scènes peintes par Watteau et Fragonard.

Avant sa destruction quasi-totale pendant la Seconde Guerre mondiale, Dresde abritait plus de 200 studios de peinture. Le style de Dresde est toutefois associé aux articles portant la marque de la couronne bleue (la marque de Meissen est une paire d'épées croisées bleu cobalt), qui a été enregistrée pour la première fois en 1883 par Richard Klemm, Donath & Co, Oswald Lorenz et Adolph Hamann. Parmi les peintres éminents de cette période, citons Helena Wolfsohn, Franziska Hirsch, Ambrosius Lamm - dont l'habileté dans l'application de peintures métalliques ou lustrées est somptueusement mise en valeur dans ce service de table des années 1920 - et Carl Thieme, un maître de la peinture florale, comme en témoigne sa décoration sur cette urne à tête de bélier des années 1901. Les peintres de Dresde ont également utilisé une technique décorative connue sous le nom de "dentelle de Dresde" Il s'agissait de tremper de la vraie dentelle dans de la porcelaine liquide et de l'appliquer sur une figurine, qui a ensuite été cuit dans un four. Le tissu se consumait, laissant une coquille fragile, semblable à une crinoline - le type de détail délicat et fantaisiste qui caractérise la porcelaine de Dresde, l'une des grandes traditions céramiques d'Europe.