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Portrait de Julien Prieur, bailli du marquis d'Armentières, en chasseur

ca. 1730

À propos de cet article

Ce portrait nous représente l'homme de confiance de la famille Conflans d'Armentières. Plus précisément, Julien Prieur était le procureur fiscal du marquisat d'Armentières, jouant le rôle de représentant du "ministère public", sauvegardant les intérêts de son seigneur. Son rôle, on l'imagine, est crucial à la mort de Michel de Can (en 1717) puisque celui-ci laisse un héritier, Louis, âgé de 6 ans seulement, et une veuve, Diane Gabrielle de Jussac, que certains mémoires décrivent comme "une grande dame très intelligente" . Prieur veille à la bonne marche des affaires de la famille et c'est sans doute pour le remercier de ses services que Diane Gabrielle fait réaliser son portrait, très probablement par un peintre proche de Jean-Baptiste Oudry. Julien Prieur apparaît tel qu'il est, d'âge mûr, avec un regard bienveillant, dans son costume de chasse. Seule sa perruque nouée le rattache à la noblesse. Il est surtout représenté comme un chasseur, une passion qu'il partageait avec le marquis d'Armentières. Son très jeune maître, Louis, devient un chasseur de premier ordre, chassant dans l'entourage du roi, dans le cabinet duquel il meurt d'apoplexie en janvier 1774. Quant à son fils, il fut l'un des plus proches compagnons de chasse de Louis XVI, comme en témoignent de nombreux souvenirs . 1. Quelques informations biographiques sur le modèle et le commissaire Alors que l'identité de nombreux portraits du XVIIIe siècle est incertaine, un ancien Label collé au dos de la toile nous donne des informations précises sur l'identité du modèle : " M. Julien Prieur, homme d'affaires de M. le Marquis d'Armentières - Commune de Brécy - Aisne ". Brécy est aujourd'hui une commune du département de l'Aisne (Hauts-de-France) située entre Soissons et Château-Thierry, légèrement au nord de l'axe Paris-Reims. Elle est limitrophe des communes d'Armentières-sur-Ourcq et de Rocourt-Saint-Martin. Selon l'acte de décès de Louis Prieur, il est en fait né en 1743 et non en 1745. . L'âge du modèle dans le tableau et la datation de cette peinture indiqueraient que Julien Prieur, est probablement né à la toute fin du XVIIe siècle. Dans Louise-Marthe de Conflans-Coigny, châtelaine de Brécy On y lit que "les Conflans étaient une famille d'ancienne noblesse, que les généalogistes font remonter au XIIe siècle, où elle serait issue de la maison de Brienne. Aux XVIe et XVIIe siècles, cette famille a eu plusieurs illustrations dans le métier des armes. [Michel de Conflans, [...] appartenait à une branche cadette de la famille, dont Saint-Simon écrivait, de sa plume trempée dans l'acide, que "pauvres et obscurs, ils n'avaient jamais quitté leur village, où leur maison ressemblait à une hutte" et ailleurs qu'ils "vivaient de leurs fusils et de leurs choux". Heureusement pour Michel de Conflans, la dernière représentante de la branche aînée, Henriette d'Armentières, en fait son héritier à sa mort en 1712. C'est par son intermédiaire que la terre de Lande et son château du XIVe siècle sont entrés dans le patrimoine de cette Branch, ainsi que, non loin de là, la terre de Brécy et le château du Buisson, où vivait la famille. Dans les premières années du XVIIIe siècle, Michel de Orleans a su se faire une place dans l'entourage du duc d'Orléans, devenant son premier gentilhomme de la chambre. Mais c'est surtout son fils Louis qui, par sa carrière militaire, rétablit le statut de la famille. Né le 23 février 1711, Louis de Conflans, marquis d'Armentières meurt d'apoplexie le 18 janvier 1774, dans le cabinet du roi à Versailles. Nommé lieutenant général en 1746, il reçoit son bâton de Marshall de France en 1768. Le Dictionnaire biographique de la France écrit de lui que "sans jamais atteindre un haut commandement, il a figuré avec honneur dans toutes les guerres de son temps". Les domaines d'Armentières et du Buisson ont été mis sous séquestre pendant la Révolution française, déclarés biens nationaux et vendus aux enchères (respectivement en 1794 et 1795) après la décapitation de la marquise d'Armentières, seconde épouse du Marshall, en 1794. Le château du Buisson (où Michel de Conflans est mort en 1717) a été acheté par une petite-fille du Marshall de Conflans, la Marquise de Coigny, en 1816 et est resté dans sa famille après sa mort en 1832 jusqu'à la vente du domaine de 1 054 hectares en 1866. On peut imaginer que le tableau, acquis par la Marquise de Coigny auprès de Louis Prieur, fils de Julien, après la mort de ce dernier, a ensuite reçu l'étiquette précisant le nom du modèle (7e tableau de la Gallery). 2. Description du portrait Le tableau représente un homme d'une trentaine d'années en costume de chasse. Représenté à mi-corps, son visage est marqué par sa vie en plein air et caractérisé par un regard d'une grande bonhomie. Tenant un fusil sous le coude, il est sobrement vêtu d'une grande veste couleur caramel, ornée de boutons argentés. Présenté de trois-quarts, le modèle tient une perdrix dans sa main droite. La veste s'ouvre sur un gilet vermillon. Une bandoulière verte contient probablement une poire à poudre cachée sous son bras, tandis qu'une sacoche est visible à sa ceinture. Le modèle porte une perruque grise, nouée dans le dos par un ruban noir qui semble voler au vent. Cette parure ancre Julien Prieur dans son époque. Il se détache sur un ciel sombre et violacé, à la fin d'une journée d'automne, dans un paysage forestier sobrement esquissé. Le traitement du ciel rappelle l'influence de Largillière, premier maître d'Oudry. 3. Jean-Baptiste Oudry Jean-Baptiste Oudry est né le 17 mars 1686 à Paris, rue de la Ferronnerie. Il entre en apprentissage vers 1705-1707 chez Nicolas de Largillière, chez qui il reste cinq ans. D'abord admis à l'Académie de Saint-Luc en 1708, il est ensuite admis à l'Académie Royale en 1717, puis admis comme peintre d'histoire en 1719. Cette année marque un tournant à partir duquel Oudry va s'affirmer en tant que peintre animalier. En 1723, il rencontre Louis Fagon, intendant des finances, et le marquis de Beringhen, premier écuyer du roi, qui deviennent à la fois amis et mécènes de l'artiste, lui donnant accès à des commandes royales et lui permettant d'être nommé peintre de la manufacture royale de tapisserie de Beauvais en 1726. A partir de 1728, la création de tapisseries devient l'essentiel de son travail, même si, parallèlement, Oudry développe ses talents d'illustrateur. Entre 1726 et 1731, ROOMS réalise le décor d'un grand salon au château de Condé-en-Brie, à une vingtaine de kilomètres de Brécy, resté en place jusqu'à aujourd'hui. Cette importante commande, dont on connaît peu de détails, aurait pour origine la comtesse de Verrüe, une grande dame de la Régence française qui séjournait souvent à Condé avec son ami Jean-François Leriget, marquis de la Faye, alors propriétaire de Condé. Artiste prolifique, Oudry remplit de nombreuses commandes parallèlement à ses contributions régulières aux Salons, auxquels il participe régulièrement jusqu'en 1753. Il est victime d'une attaque cérébrale en 1754 et meurt l'année suivante. Il semble presque certain, au vu de l'importance de son œuvre, qu'Oudry supervisait un atelier dans lequel intervenaient plusieurs artistes, mais ce point est très peu documenté. Compte tenu de la proximité géographique de Brécy et de Condé-en-Brie, des liens entre la famille d'Armentières et les mécènes de Condé, et enfin de la qualité de notre portrait, nous émettons l'hypothèse qu'il a été réalisé par l'un des peintres qui ont travaillé avec Oudry à Condé. 4. Œuvres d'art connexes : comparaison avec d'autres portraits de chasseurs par Jean-Baptiste Oudry Si Oudry abandonne progressivement le portrait à partir de 1720 pour se consacrer à la peinture animalière, il semble avoir fait une exception pour les portraits de chasseurs, souvent représentés en compagnie de leurs chiens de chasse. Deux exemples semblent particulièrement évocateurs et suggèrent une datation de notre tableau autour de 1730. Nous verrons dans une deuxième partie pourquoi cette proposition de rencontre semble pertinente. Le premier portrait qui mérite d'être mentionné est le portrait présumé du lieutenant Claude-André Courtin de Crouey, seigneur des Quatre Fils et de Cormeilles-en-Parisis réalisé en 1723, reproduit ci-dessous (8e image de la Gallery). Également présentée dans un cadre très serré, elle est intéressante pour les similitudes dans la représentation du fusil, et en particulier les deux rivets métalliques qui sont presque identiques dans notre tableau. Le tableau qui semble le plus proche du nôtre est le portrait présumé de Monsieur de Rabe, Garde des Forêts, peint vers 1730 (dernier tableau de la Gallery). Bien que ce portrait soit beaucoup plus grand, on retrouve la même pudeur dans l'habillement de ce garde forestier, dont la veste est très proche de celle de Julien Prieur. Une date autour de 1730 nous semble tout à fait compatible avec l'histoire de la famille d'Armentières. Le décès de Michel de Conflans, père du Marshall, en 1717 alors que son fils est âgé de six ans, a probablement conduit sa veuve à s'appuyer fortement sur le bailli de son mari pour l'administration de son domaine de Brécy, mais peut-être aussi pour celui d'Armentières. Nous pensons qu'elle a voulu le remercier pour son travail en lui offrant ce portrait. Oudry et son atelier réalisent l'important décor d'un salon du château de Condé-en-Brie entre 1726 et 1731. Il nous semble plausible que Diane Gabrielle de Jussac, veuve de Michel de Conflans, elle-même au service de la duchesse d'Orléans, épouse du Régent, ait connu la comtesse de Verrüe, qui joua un rôle clé dans la commande du salon Condé. Il est donc tentant de supposer qu'un peintre de l'entourage d'Oudry s'est arrêté au Buisson pour exécuter ce portrait alors qu'il se rendait à Condé-en-Brie. 5. Encadrement Ce portrait est présenté dans un cadre dont nous avons toutes les raisons de penser qu'il s'agit de son cadre d'origine, la toile n'ayant été ni coupée ni modifiée dans ses dimensions. Ce cadre en chêne sculpté et doré est décoré de légères volutes de feuillage qui courent autour de motifs centraux en relief placés dans les angles et au centre des quatre côtés. Récemment restauré, ce cadre a conservé une grande partie de sa dorure d'origine. D'un style typiquement Louis XIV, il date en fait de la période Louis XV, ce qui démontre la persistance de styles plus anciens dans les provinces françaises. Principales sources bibliographiques : Dictionnaire de biographie française, t. I, col. 739-742 (famille d'Armentières), 1933. Jean Cordey, Esquisses de portraits peints par J.-B. Oudry. 102 reproductions de dessins inédits publiés avec une étude sur Oudry portraitiste, 1929. Xavier Massary, Louise-Marthe de Conflans-Coigny, châtelaine de Brécy : un destin de femme à travers la Révolution et l'Empire Hal Opperman, J.-B. Oudry 1686-1755 par Hal Opperman, Kimbell Art Museum 1983 J. B. Oudry : 1686-1755. Galeries nationales du Grand Palais, Paris, 1er octobre 1982-3 janvier 1983 [catalogue de Hal Opperman et Pierre Rosenberg], Editions de la Réunion des musées nationaux, 1982 Philippe Seydoux, Gentilhommières des Pays de l'Aisne - Soissonais, Tardenois, Brie, Editions de la Morande Valentine del Moral - Sous Louis XV (1710 - 1774) Croÿ, Luynes, Armentières et... Prieur - Chasses Internationales Décembre 2022 - Janvier 2023
  • Année de création:
    ca. 1730
  • Dimensions:
    Hauteur : 99,55 cm (39,19 po)Largeur : 84 cm (33,07 po)
  • Support:
  • Mouvement et style:
  • Cercle de:
    Jean-Baptiste Oudry (1686 - 1755, Français)
  • Période:
    1730-1739
  • État:
    31 7/8 "x 25 9/16" (81 x 65) - encadré 39 3/16 "x 33 1/16 "(99.5x84 cm) - présenté dans son cadre original sculpté et doré d'époque Louis XV.
  • Adresse de la galerie:
    PARIS, FR
  • Numéro de référence:
    1stDibs : LU1568216356542

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Le traitement de la barbe de notre sénateur, à la fois très élaboré et très libre, est proche de celui de l'un des deux fils de Guido Guardi, dans un célèbre portrait de Santi di Tito avec les trois hommes, probablement réalisé dans les années 1570-1580. 5. Proposition d'identification du modèle En 1722, Giuseppe Manni publie un recueil intitulé Serie de' senatori fiorentini, qui donne les principales références chronologiques de tous les membres du Sénat des Quarante-Huit depuis la création de cette institution en 1532. Seuls trois sénateurs remplissent les conditions et pourraient servir de modèle pour notre portrait : ils doivent être nés entre 1507 et 1508, pour avoir 66 ans en 1574. Le premier est Bartolomeo Panciatichi, né le 21 juin 1507 et décédé le 23 octobre 1582. L'autre est Giovanni Ugolini, né le 11 mai 1508 et décédé le 18 août 1588. Élu sénateur en 1540, il est commissaire de Tito et nommé ambassadeur auprès de Sa Sainteté le pape Grégoire XIII en 1572, ce qui semble exclure la réalisation de son portrait par Santi di Tito à Florence en 1574. Quant à Simone Corsi (8 décembre 1508 - 31 mars 1587, élu sénateur en 1556), son anniversaire semble trop proche de la fin de l'année pour permettre la livraison de son portrait en 1574. L'hypothèse Bartolomeo Panciatichi nous semble la plus intéressante, d'autant plus qu'il a posé vers 1545 pour un célèbre portrait de Bronzino (dernier tableau de la galerie) dans lequel on retrouve un certain nombre de traits caractéristiques communs. S'il est toujours difficile de reconnaître un ami sur une photo prise trente ans plus tôt, il est certainement encore plus difficile de reconnaître un inconnu, représenté par deux peintres différents à trente ans d'intervalle. On reconnaît cependant la forme du nez, les pommettes assez hautes, les sourcils finement arqués et la même position de l'oreille dans les deux portraits, malgré la différence de pose, plus frontale chez Bronzino. On retrouve également la même barbe bifide, blanchie par le temps. On peut se demander si l'élégant chapeau du portrait de Bronzino ne cache pas une calvitie naissante. Le béret posé sur la table trente ans plus tard pourrait alors être interprété comme un autre élément naturaliste, le modèle s'acceptant tel qu'il est et acceptant de donner une image la plus proche possible de la réalité physique. Enfin, il est intéressant de comparer les deux expressions, et l'évolution entre le regard distancié et interrogateur du jeune homme peint par Bronzino et le regard intense et légèrement angoissé de l'homme âgé peint par Tito. 6. Quelques informations biographiques sur Bartolomeo Panciatichi Né le 21 juin 1507 à Lyon, où son père avait des intérêts commerciaux, le jeune Bartolomeo entre comme page à la cour de François Ier. Ses liens avec la France sont destinés à durer, puisque Cosimo I+I nomme plus tard Bartolomeo ambassadeur en mission diplomatique auprès du roi qu'il avait autrefois servi, puis auprès d'Henri II. Bartolomeo étudie à Padua entre 1529 et 1531, puis à Lyon, où il entre en contact avec les milieux réformateurs français. En 1534, Bartolomeo épouse Lucrezia di Gismondo Pucci et le couple s'installe à Lyon, ne revenant à Florence qu'à la fin des années 1530. Les voyages entre Florence et la France sont documentés en 1539, 1547, 1549 et 1552, mais ils étaient sans doute plus fréquents. L'intérêt du couple Panciatichi pour les doctrines de la Réforme leur a valu d'être jugés pour hérésie luthérienne en 1552 et de devoir se rétracter publiquement. Ils ont adhéré à une stricte orthodoxie catholique après leur abjuration. Bartolomeo Panciatichi a développé des contacts assez étroits avec le monde littéraire, qui ne se limitait pas à Florence, comme en témoigne son amitié avec Pietro Aretino, établi à Venise. Connu de ses contemporains principalement comme poète latin, Bartolomeo rejoint l'Accademia degli Umidi le 2 janvier 1541, quelques semaines avant Bronzino, et peu avant que le groupe ne devienne l'Accademia Fiorentina. Son portrait fait partie d'un groupe de cinq tableaux commandés par Bartolomeo à Bronzino entre 1540 et 1545 : trois scènes religieuses, deux Saintes Familles et un Christ crucifié inspirés par des idées réformistes, et deux portraits de lui et de sa femme. Nommé sénateur en 1567, Bartolomeo Panciatichi poursuit ensuite une carrière politique, devenant commissaire de Pistoia en 1568 et de Pise en 1578. Le choix d'un livre comme seul accessoire dans son portrait par Santi di Tito est doublement émouvant : il évoque évidemment l'intellectuel, mais la présence de fermoirs sur les côtés indique qu'il s'agit probablement plutôt d'un livre religieux et témoigne de sa profonde foi chrétienne. La majesté de ce portrait est rehaussée par son encadrement dans un magnifique cadre à cassettes en bois doré de la fin du XVIe siècle, qui est probablement son cadre d'origine. L'identification de l'auteur de ce portrait comme étant Bartolomeo Panciatichi ouvre un champ d'analyse fascinant. S'il est tout à fait exceptionnel d'avoir deux portraits d'un homme de la Renaissance peints à moins de 30 ans d'intervalle, le parcours de Santi di Tito, qui s'éloigne des séductions du maniérisme pour aller vers des images plus réalistes, suit l'évolution personnelle du modèle. 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