Petite vitrine d'angle de style Louis XV, montée sur bronze doré, par François Linke.
Les montures en bronze doré sont estampillées au verso "FL".
Le dos de la serrure porte la mention "A.I.C.". LINKE".
Cette vitrine d'angle bien proportionnée présente un plateau en marbre Brèche d'Alep façonné, surmonté de montants chapeautés par des montures de feuillage en bronze doré finement moulées et ciselées, encadrant une seule porte vitrée façonnée avec un cadre en bronze doré. La porte s'ouvre sur un intérieur en miroir avec deux étagères. La vitrine repose sur des pieds cabriole montés en bronze doré.
Une caractéristique notable de l'œuvre de Linke, qui constitue peut-être davantage une garantie qu'une signature, est l'utilisation d'une coquille Saint-Jacques concave, qui figure à la base de la porte. La carapace caractéristique, telle qu'elle a été conçue par le sculpteur Léon Messagé, est maintenue par de délicates vrilles d'acanthe qui se déplacent tranquillement sur la surface du verre, évoquant ainsi la forme d'un crabe.
Cette rare et charmante vitrine est si clairement issue des ateliers de Linke, avec son cachet sur les montures et la serrure de son jeune frère Clément, qu'aucune autre preuve n'est nécessaire. Cependant, le fait qu'il n'y ait pas de photographie originale montre que, bien qu'il s'agisse des archives les plus complètes d'un ébéniste de classe mondiale, toutes époques confondues, les archives Linke ne sont pas complètes et qu'il y aura certainement d'autres découvertes à faire.
François Linke
François Linke (1855-1946) était le plus important ébéniste parisien de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, et probablement l'ébéniste le plus recherché de son époque.
Il est né en 1855 dans le petit village de Pankraz, dans ce qui est aujourd'hui la République tchèque. Les archives montrent que Linke a fait son apprentissage chez le maître ébéniste Neumann. Puis, en 1875, à l'âge de 20 ans, il arrive à Paris où il vécut jusqu'à sa mort, en 1946.
On sait que les jeunes ateliers de Linke étaient actifs à Paris, dans le Faubourg Saint-Antoine, dès 1881, et qu'à cette époque, il fournissait des meubles à d'autres fabricants plus établis tels que Jansen et Krieger.
La qualité de l'artisanat de Linke n'a été surpassée par aucun de ses contemporains et a atteint son apogée avec son stand spectaculaire à l'Exposition universelle de Paris en 1900, où son Grand Bureau a remporté la médaille d'or. Il a misé sa fortune et sa réputation sur ce stand, exposant plusieurs meubles à couper le souffle avec des montures sculpturales de la qualité et des proportions les plus exceptionnelles. Son pari réussit et sa réputation fut établie tant et si bien que Linke fut la principale maison de meubles à Paris jusqu'à la seconde guerre mondiale.
Comme le rapportait l'Art Journal en 1900 sur le stand de Linke :
L'œuvre de M&One ... était un exemple de ce que l'on peut faire en cherchant l'inspiration parmi les exemples classiques de Louis XV et XVI, sans pour autant copier ces grandes œuvres. L'œuvre de M. Linke était originale au sens véritable du terme, et en tant que telle, elle se recommandait au chercheur intelligent qui recherchait les choses vraiment artistiques de l'Exposition. Un talent extraordinaire a été mis en œuvre pour produire les magnifiques pièces de mobilier exposées sur ....'.
La formation du style distinctif de Linke a été rendue possible par sa Collaboration avec le sculpteur Léon Messagé.
Ensemble, Linke et Messagé ont conçu des meubles pour le stand de Linke pour l'Exposition universelle de 1900. Ces meubles, ornés de figures allégoriques, exubérantes et coulées en haut-relief, illustrent la capacité de Linke à fusionner imperceptiblement les différentes techniques que sont la sculpture en bois, le bronze et la marqueterie en un ensemble cohérent et dynamique.
Aujourd'hui, Linke est surtout connu pour la qualité exceptionnelle de son travail, ainsi que pour son individualisme et son inventivité. Toutes ses œuvres présentent les meilleures et les plus somptueuses montures, très souvent appliquées à des corps comparativement simples. La maîtrise technique de son œuvre et le changement artistique qu'elle représentait ne seront jamais répétés.
Français, datant d'environ 1890.
La littérature :
Payne, Christopher. François Linke, (1855-1946), The Belle Époque of French Furniture, Antique Collectors' Club, (Woodbridge, UK), 2003 ; p. 208, pl. 228.
Meyer, Jonathan. Great Exhibitions - London, New York, Paris, Philadelphie, 1851-1900, Antique Collectors' Club, (Woodbridge, UK), 2006 ; pp. 298-300.
Ledoux – Lebard, Denise. Les Ébénistes du XIXe siècle, Les Éditions de l'Amateur, (Paris), 1984 ; pp. 439-43.
Revue Artistique & Industrielle, (Paris), juillet-août 1900.
Coral Thomsen, D. (éd), The Paris Exhibition 1900, The Art Journal, 1901 ; p. 341.