Importante commode en bronze doré de style Louis XVI, d'après le modèle de Jean-François Leleu par François Linke.
Française, vers 1910.
Numéro d'index Linke : 1127.
Titre Linke : "Commode Louis XVI, Bois d'amarante et de rose".
Signé "Linke" jusqu'à la goulotte de droite.
Cette commode distinguée est plaquée sur quartier en acajou avec des bandes de bois de violette et des filets de buis. Il est garni de montures en bronze doré finement moulées et surmonté d'un plateau en marbre brèche violette.
Il semble que Linke ait acheté les droits de fabrication de cette commode à la Vente Cueunières en 1902, bien qu'il n'y ait aucune trace de sa fabrication avant l'été 1908 et qu'il n'y ait pas d'entrée dans les Carnets bleus pour ce modèle. Les registres verts comportent deux pages consacrées à la fabrication des commodes, la première au prix de 1 540 et 40 centimes, huit autres ayant été fabriquées dans l'intervalle, la dernière, une paire, en 1927, dont le prix de revient s'élève à 8 529 francs. Le registre n'est pas tout à fait clair, mais il semble que Clément Linke, père et fils, ait fabriqué les serrures de ce modèle. L'ébénisterie a été confiée exclusivement à Guntren qui a mis 496 heures par commode, payée 85 centimes en 1908 et 5 francs 75 centimes pour la dernière paire. Linke a fixé le prix de cette commode à 3 000 francs français, notant dans son livre "original est de Leleu est à Trianon".
La commode originale de Leleu, prêtée par le Petit Trianon, est représentée par une gravure au trait dans la partie rétrospective de l' Exposition de l' Union Centrale des Arts Décoratifs, Paris, 1882, De Champeau & Others, 'Les arts du bois,' pub. Quantin, 1883, p. 80. La commode entre au Petit Trianon en 1867 à l'occasion d'une précédente exposition dédiée à la mémoire de Marie-Antoinette, organisée sous le patronage de l'impératrice Eugénie.
Jean-François Leleu
Élève puis collaborateur de Jean-François Oeben, Jean-François Leleu devient maître à la mort de ce dernier en 1763. Son œuvre peut être divisée en deux styles concomitants mais distincts : le premier, plus proche de l'héritage d'Eleg, est constitué de formes larges et solides, d'un style plus noble ; le second, bien que conservant les lignes nettes et précises du premier, est un exercice d'élégance et de sobriété. C'est de ce second style que Leleu s'est surtout fait connaître et dont la présente commode, avec sa forme légèrement bombée et ses frises sobres, est un des principaux exemples.
La littérature :
Payne, Christopher. François Linke, 1855-1946, The Belle Epoque of French Furniture, (woodbridge, UK), 2003 ; p. 502, pour le cliché en noir et blanc du numéro d'index 1127
Meyer, Jonathan. Great Exhibitions, Antique Collectors club, (Woodbridge, UK), 2006 ; p. 298 - 300.
Pradère, Alexandre. Fabricants de meubles français ; p. 340, fig. 398 ; et P.
Arizzoli-Clementel. Versailles Mobilier du Palais Royal 17ème et 18ème siècles, Vol. II ; pp. 122-123, pour le modèle du XVIIIe siècle commandé par le roi à Jean-François Leleu (1729-1807 ; maître 176).
LeDoux, Denise. Le Mobilier Français du XIX siècle, Les Editions de l'Amateur, (Paris) ; pp. 435-444, et p. 67, pour ce modèle de Sormani.
François Linke (1855-1946) était le plus important ébéniste parisien de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, et probablement l'ébéniste le plus recherché de son époque.
Il est né en 1855 dans le petit village de Pankraz, dans ce qui est aujourd'hui la République tchèque. Les archives montrent que Linke a fait son apprentissage chez le maître ébéniste Neumann. Puis, en 1875, à l'âge de 20 ans, il arrive à Paris où il vécut jusqu'à sa mort, en 1946.
On sait que les jeunes ateliers de Linke étaient actifs à Paris, dans le Faubourg Saint-Antoine, dès 1881, et qu'à cette époque, il fournissait des meubles à d'autres fabricants plus établis tels que Jansen et Krieger.
La qualité de l'artisanat de Linke n'a été surpassée par aucun de ses contemporains et a atteint son apogée avec son stand spectaculaire à l'Exposition universelle de Paris en 1900, où son Grand Bureau a remporté la médaille d'or. Il a misé sa fortune et sa réputation sur ce stand, exposant plusieurs meubles à couper le souffle avec des montures sculpturales de la qualité et des proportions les plus exceptionnelles. Son pari réussit et sa réputation fut établie tant et si bien que Linke fut la principale maison de meubles à Paris jusqu'à la seconde guerre mondiale.
Comme le rapportait l'Art Journal en 1900 sur le stand de Linke :
L'œuvre de M&One ... était un exemple de ce que l'on peut faire en cherchant l'inspiration parmi les exemples classiques de Louis XV et XVI, sans pour autant copier ces grandes œuvres. L'œuvre de M. Linke était originale au sens véritable du terme, et en tant que telle, elle se recommandait au chercheur intelligent qui recherchait les choses vraiment artistiques de l'Exposition. Un talent extraordinaire a été mis en œuvre pour produire les magnifiques pièces de mobilier exposées sur ....'.
La formation du style distinctif de Linke a été rendue possible par sa Collaboration avec le sculpteur Léon Messagé.
Ensemble, Linke et Messagé ont conçu des meubles pour le stand de Linke pour l'Exposition universelle de 1900. Ces meubles, ornés de figures allégoriques, exubérantes et coulées en haut-relief, illustrent la capacité de Linke à fusionner imperceptiblement les différentes techniques que sont la sculpture en bois, le bronze et la marqueterie en un ensemble cohérent et dynamique.
Aujourd'hui, Linke est surtout connu pour la qualité exceptionnelle de son travail, ainsi que pour son individualisme et son inventivité. Toutes ses œuvres présentent les meilleures et les plus somptueuses montures, très souvent appliquées à des corps comparativement simples. La maîtrise technique de son œuvre et le changement artistique qu'elle représentait ne seront jamais égalés.
Bibliographie :
Payne, Christopher. François Linke, (1855 -1946), The Belle Époque of French Furniture, Antique Collectors' Club, (Woodbridge, Royaume-Uni), 2003.
Meyer, Jonathan. Great Exhibitions - London, New York, Paris, Philadelphie, 1851-1900, Antique Collectors' Club, (Woodbridge, UK), 2006 ; pp. 298-300.
Ledoux – Lebard, Denise. Les Ébénistes du XIXe siècle, Les Éditions de l'Amateur, (Paris), 1984 ; pp. 439-43.
Revue Artistique & Industrielle, (Paris), juillet-août 1900.
Coral Thomsen, D. (éd), The Paris Exhibition 1900, The Art Journal, 1901 ; p. 341.